Le parcours des grèves sardinières

Un parcours touristique et culturel original porté et imaginé par Emglev bro Douarnenez, association qui valorise la langue et la culture bretonnes, avec l’illustratrice Marianne Larvol et en partenariat avec l’Office de Tourisme du Pays de Douarnenez.

La mise en place par Marianne Larvol


Marianne Larvol

Le parcours

12 étapes de la Place de la Gare avec Lucie Colliard au port du Rosmeur avec Joséphine Pencalet.

Parcours des grèves sardinières sur le plan de Douarnenez

Parcours des grèves sardinières sur le plan de Douarnenez

Du bateau à l'usine - Illustration de Marianne Larvol

Dans la deuxième moitié du XIXème siècle, Douarnenez devient un grand centre industriel, suite à la création de nombreuses conserveries. Fin 1924, Près de 2 000 femmes d’usines travaillent dans 23 conserveries.
Les femmes occupent 3 types de postes : l’étêtage et étripage les sardines, les contremaitresses qui encadrent les ouvrières, et les commises qui sont sur le port attendant le retour des pêcheurs pour acheter aux enchères le poisson.

Daniel Le Flanchec - Illustration de Marianne LarvolDaniel Le Flanchec est maire Douarnenez de 1924 à 1940. Son engagement et son soutien total à la grève fait de lui un véritable « héros » auprès des marins et femmes d’usines.

Témoignage : « Mélanie, ancienne syndicaliste CFTC», enregistrée par Nicole Le Garrec, 1977 

La ville en grève - Illustration de Marianne Larvol

Pemp real a vo : « 25 sous nous aurons ». Tel est le slogan qui retentit dans les rues de Douarnenez lors des défilés quotidiens. Les ouvrières gagnent 0,80 F l’heure. Le 21 novembre, la grève éclate et s’étend à toute la ville le 24.

Chansons : « pemp real a vo » chanté par Marie Le Moan-Prévosto, La Cale, en 2022, puis avec Jean-Pierre Hélias « Cinq sous nous aurons : C’est les femmes qui chantaient ça ! » (Robert Olier). « C’était pour demander cinq sous d’augmentation, le réal, c’était avant le sou. » (Marie Prévosto). Le réal est une monnaie espagnole utilisée du XIVe au milieu du XIXe siècle. Ce refrain a résonné durant la grande grève de 1924. « 25 sous tout de suite, il nous faut 25 sous – pemp real c’était 25 sous. (…) et alors on a fait une grève (…) près de deux mois. En train de faire des tours autour de la ville partout en chantant pemp real a vo. »

Mme Quero - Illustration de Marianne Larvol

Une femme parmi les usiniers

Les patrons d’usines font front commun contre les revendications des grévistes. Alors que le comité de grève est reçu par le Ministre du Travail, une patronne d’usine, Mme QUERO accepte les revendications salariales. le 23 décembre 1924.

Témoignage : « Mélanie, ancienne syndicaliste CFTC», enregistrée par Nicole Le Garrec, 1977

Le 1er janvier 1925, une tentative Tentative d'assassinat de Daniel Le Flanchec le 1er janvier 1925 - Illustration de Marianne Larvold’assassinat est menée par des briseurs de grèves contre Daniel LE FLANCHEC (maire de Douarnenez très engagé dans les grèves). Blessé à la gorge, hospitalisé à Quimper, il revient le 5 janvier 1925 sous les acclamations des grévistes.

Témoignage : « Mélanie, ancienne syndicaliste CFTC», enregistrée par Nicole Le Garrec, 1977

Mme Morvan - Illustration de Marianne Larvol

Les femmes de Douarnenez sont appelées Penn Sardin. C'est le nom des coiffes qu'elles portent sur la tête.

En 1905, une première grève permet aux femmes d'obtenir le paiement à l'heure et non plus au mille de sardines.

Un syndicaliste à Douarnenez
Fort de la victoire des Penn SardinCharles Tillon - Illustration de Marianne Larvol (femmes d’usines de Douarnenez), il œuvre sur toute la façade atlantique auprès des ouvrières pour améliorer leurs conditions de travail.
Pendant la seconde guerre mondiale, Charles Tillon devient commandant en chef des FTP (Francs Tireurs Partisans) puis ministre sous le gouvernement De Gaulle.

La révolte des Sardinières, Charles Tillon, 1926 – Musée de Bretagne

La révolte des Sardinières, peinture de Charles Tillon, 1926 – Musée de Bretagne

Extraits de Charles Tillon ; le chef des FTP trahi par les siens, de Fabien Tillon, éditions Seuil, 2021

« Charles se multiplie pour uneCharles Tillon, le chef des FTP trahi par les siens de Fabien Tilloncause qui, dès les débuts, l’électrise et l’envoûte. Il participe à la naissance des cantines populaires, suscite la solidarité dans toute la Bretagne, parmi les paysans, les ouvriers d’autres secteurs, bientôt dans toute la France. Il cherche, avec Le Flanchec et une poignée de députés de gauche, à réunir les moyens de subsistance nécessaires pour garder au chaud les milliers de famille qui sont entraînées dans la lutte. Avec le Comité de grève, il improvise une chaîne de solidarité dans tout le pays, presse, municipalités, coopératives, militants, particuliers… L’affaire devient nationale, et, pour la CGTU, prend les formes d’un combat exemplaire.
[…]
Il multiplie les tournées sur la côte, à vélo, de Loctudy à Kerity-Penmarch, de Pont-l’Abbé au Guilvinec, tentant d’étendre les avancées obtenues à d’autres usines…»

 

M. Bordennec - Illustration de Marianne LarvolUn marin dans la grève
Le port de Douarnenez compte près de 500 chaloupes et 5000 marins. En 1924, ils restent à terre et soutiennent la grève.

Chanson : « Mec’hed ar friturioù »
Chanté par Pierre-Yves Pétillon, accompagné à la vielle par Michel Colleu, 2022. Le texte est celui recueilli par Herlé Denez en 1995 auprès de Renée Berlivet, qui l’a appris chez Pennamen ; version publiée dans Mémoire de la Ville en 1996, n° 26, p. 9. La mélodie et un couplet ont été transmis par René Losq le 29/05/2021. Il a entendu la chanson en travaillant le poisson à bord du mauritanien Tarentelle (DZ3969) en 1961, elle était chantée par Alexandre Le Moan.

1 – Merc’hed Eugène Jacq zo begoù bras Brasoc’h

o beg evit ur votez koad

R – Jouez là et là-bas Hag ar sac’h war e benn. Et le rin trin trin Et l’argent du meunier

2 – E ti Pennamen zo leun a c’hwen
Emaint ’doug an deiz gant o morzenn

3 – E ti Lozac’hmeur emaint div-ha-div
É pignat ar grec’henn emañ ar galeoù

4 – Merc’hed Penanros zo reñfermet
emaint diwallet deus ar paotred

5 – Merc’hed Chemin zo merc’hed lor
Enjoentiñ ar marc’h da gouezhet en aod

6 – E ti Marlière o deus bronnoù bras
A daol anezho a dreist o skoaz

7 – Hag e ti Guy zo seurezed
Emaint ’doug an deiz gant ur chapeled

Traduction

1 – Les filles de chez Eugène Jacq sont de grandes gueules. 

Leurs bouches sont aussi grandes que leurs sabots de bois

R – Jouez là et là-bas et le sac sur sa tête…

2 – Chez Pennamen leurs têtes sont pleines
Toute la journée avec leurs torpilles (genre de poisson)

3 – Chez Lozac’hmeur elles sont deux par deux
Grimper la montée c’est le bagne

4 – Les filles de Penanros sont renfermées
Elles sont préservées des garçons

5 – Les filles de Chemin sont des filles sales
Enjoignent le cheval de ne pas tomber sur la plage

6 – Chez Marlière elles ont de grosses poitrines
Elles les jettent par-dessus leurs épaules

7 – Et chez Guy ce sont des (bonnes) sœurs
Toute la journée elles font leurs chapelets.

 

Mme Julien - Illustration de Marianne Larvol

Membre du comité de grève
Sans salaire, la population s’organise pour tenir et subvenir aux besoins de la famille.
Mme JULIEN s’occupe de la caisse de solidarité, de l’organisation de la soupe populaire.

Chanson : Tan pinvidik e penn an dig chanté par Les Voisines, La Cale, 2022

Le 1er couplet (paroles et musique) a été recueilli à Douarnenez par René Pichavant, qui l’a publié dans Champilla en 1978. Les couplets suivants ont été « douarnenisés » par Les Voisines à partir de deux versions chantées au Guilvinec dans les conserveries.

1 – Tan pinvidik e penn an dig
Tan pinvidik e penn an dig
Hag en deus graet ur ploñj a pik
Hag en deus graet ur ploñj a pik
Hag en deus graet ur ploñj a pik
Charmante brune
Hag en deus graet ur ploñj a pik
E penn an dig2 Tan pinvidik war penn an dig (bis)
Ar merc’hed yaouank a ’deus lik (bis)
Ar merc’hed yaouank a ’deus lik (bis)
Charmante brune
Ar merc’hed yaouank a ‘deus lik
E penn an dig

3 Tan pinvidik ’ba’ lost an dro…
Ar merc’hed yaouank a ‘deus tro…
’Ba’ lost an dro…

4 Tan pinvidik ’kichen Porzh Gad…
Merc’hed yaouank o riboulat…
’Kichen Porzh Gad…

5 Tan pinvidik war ar Flimioù…
Ar merc’hed yaouank a ‘deus liv…
War ar Flimioù

6 Tan pinvidik war ar Rosmeur…
Ar merc’hed yaouank a ‘deus fleur…
War ar Rosmeur

7 Tan pinvidik e ti Micheline…
Setu n’em gavet ar Voisines…
E ti Mich’line

Traduction

1 Tan pinvidik au bout de la digue
Et il a fait un plongeon à pic
Au bout de la digue

2 au bout de la digue
Les jeunes filles ont le hoquet

3 Au bout du virage
Les jeunes filles ont du tour (avoir une habilité particulière)

4 Près de Porscad
Les jeunes femmes font la fête

5 Sur le Flimioù
Les femmes ont des couleurs

6 Sur le Rosmeur
Les jeunes filles ont des fleurs

7 Chez Micheline
Voilà les Voisines.

La Victoire - Illustration de Marianne Larvol

La grève se termine le 8 janvier 1925. Elle a duré 46 jours. Les femmes obtiennent 1F l’heure au lieu des 80 cts, les heures de nuit majorées, la reconnaissance du droit syndical.
Une grève de femmes victorieuse qui rayonnera bien au delà de Douarnenez.

La chanson des Penn Sardin

Joséphine Pencalet - Illustration de Marianne Larvol

Engagée dans la grève, Joséphine Pencalet va marquer l’Histoire en devenant l’une des 10 premières femmes françaises à siéger dans un conseil municipal en mai 1925. Les femmes n’ayant pas encore le droit de vote, son élection est invalidée en novembre 1925.

L’Élection interdite : Itinéraire de Joséphine Pencalet, ouvrière bretonne (1886-1972) de Fanny Bugnon - Extrait :

« Née à Douarnenez en 1886 d’un père marin et d’une mère « femme de friture », Joséphine Pencalet reflète la condition ouvrière de la ville. Ouvrière de conserverie, elle participe à la grève au côté de plus de 2000 ouvrières et ouvriers. C’est dans ce contexte qu’elle signe son premier engagement en adhérant au syndicat CGTU. Au printemps 1925, moins de quatre mois après le dénouement victorieux du conflit, son nom est placardé sur les murs de Douarnenez : elle est candidate à l’élection municipale sur la liste de Daniel Le Flanchec. Le 3 mai 1925, la liste communiste triomphe en remportant 26 des 27 sièges au 1er tour. Joséphine Pencalet est ainsi proclamée élue. La situation est inédite : alors que les Françaises sont dépourvues des droits politiques, une femme est pour la première fois élue. Au total, elles sont dix dans ce cas en France. La loi n’interdit en effet pas aux femmes de se porter candidates. La justice administrative se met en marche dans les semaines qui suivent : la Préfecture invalide son élection au motif qu’elle est une femme ; Joséphine Pencalet conteste cette décision devant le Conseil d’État. Ce pourvoi lui permet de siéger au conseil municipal de Douarnenez jusqu’à la confirmation de l’annulation de son élection le 27 novembre 1925. Restée par la suite à l’écart du jeu électoral, elle meurt à Douarnenez en 1972. »